Dans la forêt vierge de l'ascenseur vous avez appuyé sur le bouton rouge jusqu'au blocage convulsif de nos plus superbes lianes. Du théâtre humide qui s'écroule à chaque fois, restent évasifs, les rires écarlates des jambes pour avaler le sillage pirate de nos ventres déployés. Et la longue caresse de parquets cités sur nos hanches presque blanches de chaleur. Au bord des prairies noires et blanches du lit, un fleuve a coulé, tiède, dans mon oreille renversée. Les quatre coins de la chambre des yeux s'étirent en bandeau au fond du couloir des muqueuses. C'est au ras des veines que je chevaucherai votre nuque jusqu'à ce que notre voracité s'étale en cape de plomb sur mes épaules tremblantes. Reviendrez-vous toujours aussi triomphant de vos courses solitaires entre les rues de verre, pour me cabrer du bout des gants ? Elle se laissa lécher, en silence, jusqu'à ce que le matin passe sur le front des faubourgs. Les draps de jour nous ont jetés dans les assourdissantes citernes bleues des odeurs. ... Il y a des fesses belles comme l'ombre des pierres sous les pieds brûlants de midi, furtivement. Perpendiculaire à vous, je rejoins la sinueuse pâleur que vous faites irrésistiblement monter dans les herbes translucides de ma colone vertébrale. ... La jolie houle des vêtements que la nudité immédiate a déjà engloutis. Je me suis laisé découper par votre ombre ce dimanche d'hiver où vous avez traversé ma vie.
Annie Lebrun
Anthologie érotique, Pierre Perret, p. 549 Albin Michel